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Réforme de l’assurance-chômage mi-figue, mi-raisin

En vigueur depuis le 18 décembre 1990, la réforme de l’assurance-chômage profite à certaines travailleuses, mais elle en désavantage plusieurs autres, particulièrement en cette période de récession.

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En vigueur depuis le 18 décembre 1990, la réforme de l’assurance-chômage profite à certaines travailleuses, mais elle en désavantage plusieurs autres, particulièrement en cette période de récession. Régime de juridiction fédérale, l’assurance-chômage vise à compenser la perte de revenu du personnel salarié en cas de chômage, de maladie ou lors de la naissance ou de l’adoption d’un enfant. Dans ce dernier cas, avec la réforme, 10 semaines de prestations parentales viennent à présent s’ajouter aux 15 semaines de prestations de maternité déjà prévues. Le père ou la mère (ou les deux parents s’il y a partage des prestations) peuvent ainsi prendre soin de leur jeune enfant. Contrairement à l’ancienne loi, les travailleuses et les travailleurs peuvent toucher ces prestations en cas de grève ou de lock-out. Cependant, les conditions imposées (absence déjà prévue et démarche préalable à l’arrêt de travail) restreignent la portée de cette disposition. Par ailleurs, la loi permet maintenant aux personnes qui travaillent après 65 ans et à celles qui sont à l’emploi de leur conjoint ou conjointe (les collaboratrices salariées par exemple) de participer au programme d’assurance-chômage.

Moins généreux en cas de chômage

Les personnes qui occupent un emploi temporaire, saisonnier ou à temps partiel peuvent devenir, en cas de chômage, les premières victimes de la réforme et, parmi elles, les jeunes et les femmes (ces dernières occupent 70% des postes à temps partiel). Une partie des employés à temps partiel (celles et ceux qui travaillent moins de 15 heures par semaine ou qui gagnent moins de 20% de la rémunération maximum assurable) était déjà exclue de la protection de l’assurance-chômage. Le nombre de semaines de travail requis étant maintenant de 10 à 20 selon le taux de chômage de la région (il était auparavant entre 10 et 14), d’autres employées et employés risquent d’être privés de prestations faute d’avoir été en emploi assez longtemps. Si jamais elles et ils en reçoivent, c’est désormais sur une période plus courte. En ce sens, le régime d’assurance-chômage tient peu compte des réalités actuelles de l’emploi : augmentation impressionnante des postes de courte durée ou à temps partiel, manque d’emplois à temps plein. Par ailleurs, des exigences plus strictes sont maintenues pour les personnes qui arrivent sur le marché du travail ou qui s’y réintègrent (20 semaines d’emploi sont alors exigées avant d’être admissibles à des prestations). Cette exigence continue de desservir les femmes qui doivent s’absenter du marché du travail pour s’occuper de leurs enfants. Auparavant, les personnes qui refusaient ou quittaient un emploi sans motif jugé valable étaient passibles d’une coupure de prestations allant de 1 à 6 semaines. Cette pénalité sera portée de 7 à 12 semaines, les prestations s’élevant par la suite à 50% de la rémunération au lieu des 60% habituels. Selon le Conseil consultatif canadien de la situation de la femme, les femmes risquent d’être plus touchées que les hommes par cette mesure : elles sont surreprésentées dans le groupe des personnes qui quittent volontairement leur emploi. La loi prévoit toutefois des circonstances où ces pénalités ne s’appliquent pas : travail dangereux pour la santé, harcèlement sexuel, réaffectation du conjoint dans un autre lieu de travail, nécessité de prendre soin d’un enfant.

Nouvelles orientations contestables

Le gouvernement fédéral qui défrayait ces dernières années environ 25% des dépenses de l’assurance-chômage se retire complètement du financement de ce régime. Ce désengagement a de quoi surprendre quand on sait que les taux de chômage dépendent des choix que le gouvernement fédéral fait sur les plans monétaire et fiscal. En dépit de ce retrait, il réoriente une partie des fonds du programme vers la formation professionnelle. Cet effort accru du fédéral se produit alors que l’on déplore déjà des interventions gouvernementales multiples et incohérentes en formation professionnelle. Au même moment, le Québec veut agir seul dans ce domaine et rapatrier les sommes que le gouvernement fédéral y consacre. De vives discussions en perspective…