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Des personnes à part entière

Les femmes sont des personnes. Tu t’en doutais ? Pourtant, ce n’est que depuis 1929 qu’elles le sont officiellement !

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1929 Le jour où les femmes sont devenues des personnes

Les femmes sont des personnes. Tu t’en doutais ? Pourtant, ce n’est que depuis 1929 qu’elles le sont officiellement ! Avant cette date, ce n’était pas clair. Les textes légaux stipulaient que certaines fonctions, comme celle de sénateur, devaient être réservées aux « personnes » ayant les compétences voulues. Les femmes pouvaient-elles accéder au Sénat ? Il fallait d’abord établir si elles étaient des personnes ! La question fut débattue en Cour suprême en 1927, à la suite de démarches entamées par cinq Canadiennes, dont la magistrate albertaine Emily Murphy. Après 40 jours d’âpres discussions, les juges ont tranché : non ! Le terme n’incluait pas les individus de sexe féminin. Emily et ses comparses se sont alors tournées vers Londres, où se trouvait le plus haut tribunal de l’époque. Le 18 octobre 1929, celui-ci annulait la décision de la Cour suprême et décrétait que les femmes étaient bel et bien des personnes ! Un an plus tard, la Canadienne Cairine Reay Wilson entrait au Sénat.

1940 La longue lutte des suffragettes

Par une froide journée de février 1922, 200 femmes en robe austère, manteau long et chapeau envahissent le parlement de Québec. Elles réclament le droit de vote, que leurs sœurs des autres provinces ont progressivement obtenu depuis 1916. Le premier ministre Taschereau leur opposera un refus condescendant. Dans les journaux, les jours suivants, on ridiculisera leur ambition en les traitant de « grands enfants du sexe féminin […], charmants sans doute, [mais] ignorants » ! Leurs opposants sont forts. Ils comptent les hommes d’Église, la majorité des politiciens et journalistes et, crois-le ou non, plusieurs groupes de femmes, qui amassent 40 000 noms sur une pétition anti-vote. Selon eux, le suffrage féminin mettrait en péril la famille et la société.

Chaque année, entre 1927 et 1940, les troupes des suffragettes Idola Saint-Jean et Thérèse Casgrain referont leur courageux pèlerinage à Québec. Elles obtiendront finalement gain de cause pendant la Deuxième Guerre mondiale. Si les Québécoises ont pénétré dans l’isoloir avec du retard sur les Canadiennes, les Américaines et les Anglaises, elles y ont néanmoins précédé les Françaises (1945), les Suissesses (1971) et les Koweïtiennes… qui ont voté pour la première fois cet été !

1964 Se marier, ce n’est plus mourir légalement

Difficile à croire, mais jusqu’en 1964, les femmes mariées avaient besoin de la signature de leur mari pour avoir un compte en banque, exercer une profession, signer un contrat ou intenter une poursuite en justice. On comprend pourquoi la féministe Marie Gérin-Lajoie avait qualifié le mariage de « mort légale de la femme » !

C’est grâce à la première députée québécoise, Claire Kirkland-Casgrain, que les choses ont changé. Cette politicienne est à l’origine du projet de loi 16, qui mettra fin à ce qu’on appelle l’incapacité juridique de la femme mariée. Dans les faits, les épouses n’avaient pas attendu la nouvelle loi pour pratiquer un métier sans l’autorisation de leur mari. Pourtant, plusieurs années après, les notaires et les banquiers ont continué, par habitude, à demander la signature de l’homme…

1971 Pourquoi témoin, mais pas jurée ?

« Discrimination ! » « La justice, c’est de la marde ! » C’est en scandant de tels slogans que, le 1er mars 1971, sept membres du Front de libération des femmes ont pris d’assaut le box des jurés pendant le procès de Paul Rose (activiste du Front de libération du Québec impliqué dans le meurtre du ministre Pierre Laporte). Par ce geste spectaculaire, elles voulaient protester contre l’interdiction faite aux femmes d’être jurées, une interdiction qui ne touchait plus que le Québec et Terre-Neuve. Si elles devaient être témoins lorsqu’on les appelait à la barre, pourquoi ne pouvaient-elles pas faire partie d’un jury ? Leur action illégale leur valut quelques semaines de prison. Mais les filles avaient réussi à se faire entendre et la loi fut changée quelques mois après leur coup d’éclat.

1981 Adieu madame Paul-Émile Thibodeau !

Aurais-tu aimé te nommer madame Paul-Émile Thibodeau ? Et avoir pour meilleure amie madame Samuel Potvin ? C’est ainsi, en ajoutant « madame » devant le nom complet de leur mari, que se faisaient appeler nos aïeules ! En 1981, le Code civil met un terme à cette tradition en reconnaissant que le nom légal d’une femme est celui qu’elle a reçu à sa naissance. C’est ce nom qu’elle doit utiliser lorsqu’elle prend son permis de conduire ou signe un contrat. De plus, les Québécoises peuvent désormais transmettre leur nom de famille à leurs enfants. À partir de là, le concept de « chef de famille » est complètement balayé de la loi. Les époux sont égaux et se partagent les responsabilités. L’image du père, autorité suprême dans la chaise capitaine du bout de la table, appartient bel et bien au passé !