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La taxe rose, non merci

La taxe rose, celle qui nous fait rire jaune et voir rouge!

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La taxe rose nous fait voir rouge, avec raison. Pourquoi une femme devrait-elle payer plus cher la version féminine d’un parfum? Et un rasoir jetable rose plutôt que noir? Et sa coupe de cheveux? Avertissement : aucune réponse satisfaisante ne figure dans cet article.

Théo et Jeanne s’en vont au salon de coiffure. Ils ont tous les deux les cheveux aux épaules. Ils se les font couper, sécher et « placer ». Qui paiera plus, vous croyez? Eh oui : Jeanne.

Idem quand viendra le temps d’acheter une crème hydratante, un rasoir jetable, un gel douche, un parfum, et même des jeans. Un exemple frappant? Le même soin contour des yeux de Biotherm coûte 27 $ pour les hommes et 40 $ pour les femmes, comme l’a montré un reportage de l’émission Ça vaut le coût (Télé-Québec) en 2015.

Pourtant, les femmes gagnent encore 14 % de moins que les hommes au Québec. Les prix discriminatoires sont donc doublement pénalisants pour elles.

Mon parfum est plus cher que le tien

En janvier dernier, un reportage de l’émission La facture à ICI Radio-Canada braquait les projecteurs sur ce qu’on nomme la taxe rose. Un homme et une femme avaient comme mandat de s’acheter les mêmes produits et services, avec un budget total de 300 $. Au final, la facture s’élevait à 203,44 $ pour lui et à 287,33 $ pour elle, taxes incluses. Une différence de 17 %.

Image illustrant la différence de coûts des produits pour femmes versus ceux des hommes.

L’écart était particulièrement révélateur pour le parfum Neiges, de Lise Watier, à 72,43 $ pour elle et 59,79 $ pour lui. La compagnie le justifiait par « le design du flacon et les ingrédients utilisés ». Pour expliquer le prix plus élevé de la coupe de cheveux féminine, on mentionnait que les femmes reçoivent plus de soins que les hommes au salon. Ce qui est faux. Logiquement, les salons devraient facturer en fonction de la longueur ou du type de cheveux, pas du sexe.

Ce qui se passe ailleurs

À New York et en Californie, une législation interdit de facturer un service plus cher selon le sexe, par exemple à la blanchisserie ou au salon de coiffure. Dans la Grosse Pomme, les entreprises fautives sont passibles d’une amende de 250 $.

La Ville songerait même à étendre la loi aux produits. Dans une étude qu’elle a menée en 2015 sur 800 produits, elle concluait que dans 42 % des cas, la femme payait plus cher. Ou les parents d’une petite fille : une trottinette rouge vendue dans le rayon des garçons d’un grand magasin new-yorkais coûtait 24,99 $, alors que la même trottinette, en rose, se détaillait 49,99 $. Rien de moins que le double du prix! Selon cette étude, en général, les femmes paient 8 % de plus pour leurs vêtements, 13 % de plus pour les produits d’hygiène, et les jouets « pour filles » coûtent 7 % plus cher.

En France cependant, une étude menée en 2015 dans 7 000 supermarchés a conclu que certains produits pour hommes sont parfois moins chers, parfois plus.

Pourquoi on paie plus?

Les raisons qui justifient les écarts entre les prix des produits pour hommes et femmes sont variées, mais rarement satisfaisantes. On prétend que les femmes seraient prêtes à payer plus cher (et que les commerçants en profitent), ou que les coûts de production des versions féminines sont plus élevés. On invoque aussi la loi de la demande : comme certains produits pour femmes se vendraient moins, il faut augmenter leur prix pour maintenir un profit acceptable. Les femmes achèteraient donc moins de crème hydratante que les hommes? Il faudrait mener une étude là-dessus.

Qui doit se pencher sur le problème? À l’Office de la protection du consommateur, on renvoie la balle à la Commission des droits de la personne, puisqu’il s’agit de discrimination.

En attendant que les choses bougent, on ne manque pas une occasion de dénoncer la situation et d’acheter les versions pour hommes quand c’est possible. Quitte à avoir les aisselles qui sentent la « Frontière arctique » plutôt que la poudre pour bébés…